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Bail commercial : l'inventaire précis des charges, une obligation légale pour une transparence accrue

19 mars 2025

Rédigé par : Marc Huynh

La loi Pinel de 2014 a instauré une obligation cruciale pour les baux commerciaux : l'établissement d'un inventaire précis et limitatif des charges, impôts, taxes et redevances. Pour les locataires comme pour les bailleurs, une compréhension claire de ces obligations est essentielle pour éviter des litiges coûteux. Notre cabinet d'avocats vous accompagne dans la rédaction et l'analyse de vos baux commerciaux, en veillant à la conformité de l'inventaire des charges avec les dernières évolutions législatives et jurisprudentielles.

L'Obligation d'un Inventaire Précis des Charges dans le Bail Commercial

L'article L. 145-40-2 du Code de commerce, issu de la loi Pinel du 18 juin 2014, dispose que le contrat de location doit comporter un inventaire précis et limitatif des catégories de charges, impôts, taxes et redevances liés à ce bail, incluant leur répartition entre le bailleur et le locataire. Cette disposition vise à assurer la transparence de la relation contractuelle et à prévenir les contentieux ultérieurs.


L'article L.145-40-2 du Code de commerce précise que cet inventaire doit donner lieu à un état récapitulatif annuel adressé par le bailleur au locataire dans un délai réglementaire. De plus, en cours de bail, le bailleur est tenu d'informer le locataire de toute nouvelle charge, impôt, taxe ou redevance. L'objectif principal de cette disposition est d'assurer une plus grande transparence pour le locataire concernant les dépenses qu'il devra supporter durant l'exécution du bail commercial.


Forme et Contenu de l'Inventaire : Les Précisions de la Jurisprudence

L'obligation d'inclure un inventaire des charges s'applique aux baux conclus ou renouvelés après le 1er septembre 2014. Bien que la loi ne précise pas explicitement la forme de cet inventaire, celui-ci peut figurer soit dans une annexe distincte, soit dans le corps même du bail, à condition que les charges soient détaillées, claires et non ambiguës. La jurisprudence a rappelé que si l'inventaire est impératif, cela n'empêche pas que d'autres clauses du bail puissent viser la refacturation de charges non listées dans l'inventaire (Cour d'appel de Rennes, 27 novembre 2024 n°22/00385). Toutefois, chaque charge refacturable doit être explicitement mentionnée pour respecter l'objectif de transparence et de clarté de la loi. En cas de doute, les clauses sont interprétées en faveur du locataire, conformément à l'article 1190 du Code civil.   


L'inventaire doit notamment rappeler l'intégralité des charges liées au bail et ne peut être remplacé par une clause imputant seulement certaines charges au preneur (Cour d'appel de Versailles, 7 mars 2024, n° 22/05759). Seules les charges expressément prévues au bail peuvent être imputées au preneur (Cour de cassation, 3ème chambre civile, 13 juin 2012 n°11-17.114 ; Cour de cassation, 17 mai 2018 n°17-11.088). Les dépenses incombant directement au locataire pour l'exploitation du local ne sont pas considérées comme des charges relevant de l'inventaire.   


L'article R145.35 du Code de commerce liste les charges qui ne peuvent plus être imputées au preneur depuis le décret du 3 novembre 2014, telles que les grosses réparations (article 606 du Code civil), les travaux de vétusté ou de mise en conformité relevant des grosses réparations, les impôts, taxes et redevances dont le redevable légal est le bailleur (sauf exceptions), les honoraires du bailleur liés à la gestion des loyers, et dans un ensemble immobilier, les charges relatives à des locaux vacants ou imputables à d'autres locataires.   


L'inventaire doit également prévoir une répartition des charges entre le bailleur et le preneur par catégories (Cour d'appel de Bordeaux, 2 mars 2022, 4e civ., nº 18/04413). Dans un ensemble immobilier comportant plusieurs locataires, le contrat de location doit préciser la répartition des charges ou du coût des travaux entre les différents locataires en fonction de la surface exploitée. Le montant des impôts, taxes et redevances imputables au locataire correspond strictement au local occupé et à la quote-part des parties communes nécessaires à l'exploitation (article L145-40-2 du Code de commerce). À défaut de clé de répartition contractuelle, les dépenses ne sont pas recouvrables (CA Paris, 15 mai 2019). Dans un immeuble en monopropriété avec plusieurs locataires, la répartition des charges s'effectue au prorata de la surface exploitée. Dans un immeuble en copropriété, les tantièmes applicables au lot exploité par le locataire doivent être rappelés.   


Conséquences de l'Absence ou de l'Incomplétude de l'Inventaire

L'article L145-40-2 du Code de commerce est d'ordre public et toute clause contraire est réputée non écrite (article L.145-15 du Code de commerce). Ainsi, en l'absence d'un inventaire conforme, le bailleur ne peut procéder à la refacturation des charges (Tribunal judiciaire de Paris, 18ème chambre, 14 novembre 2024 n° 20/10175). Cette irrégularité ne peut être régularisée ultérieurement par la production de décomptes ou de justificatifs. Le paiement des charges par le preneur sans contestation préalable ne fait pas obstacle à une demande de remboursement ultérieure (Cour de cassation, 13 février 2025 n°23-17.978).   


Conclusion : Une Rédaction Rigoureuse pour Sécuriser la Relation Locative

En conclusion, la rédaction d'un inventaire précis et limitatif des charges dans le bail commercial est une obligation légale essentielle. Sa conformité aux dispositions légales et aux interprétations jurisprudentielles est cruciale pour la validité des clauses de charges et pour la prévention des litiges entre bailleur et locataire. L'assistance d'un conseil juridique est fortement recommandée afin de garantir la sécurité juridique de la transaction.


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